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Philippe Dehaes: "Venez les encourager, elles le méritent !"

Grand connaisseur du tennis féminin, Philippe Dehaes coache Greet Minnen depuis un an, et cela se passe plutôt bien puisque l'Anversoise pointe à nouveau aux alentouts du Top 60 mondial. A la veille du match de barrage de Billie Jean King Cup Belgique-Hongrie, qui se déroulera le week-end prochain au Dôme de Charleroi, il ne cache pas son admiration pour les deux fers de lance de notre équipe qui sera privée on le sait d'Elise Mertens.
 

Samedi et dimanche prochains, l'équipe belge de Billie Jean King Cup (anciennement Fed Cup) jouera sa qualification pour les... qualifiers face à la Hongrie sous le Dôme de Charleroi qui pourra accueillir 2.500 personnes pour la circonstance.
En cas de victoire, nos joueuses retrouveront une chance, début 2024, de se hisser à nouveau en phase finale. On le sait, la numéro une belge Elise Mertens, qui s'est illustrée au Masters de double à Cancun où elle a été demi-finaliste, et Alison Van Uytvanck, insuffisamment rétablie d'un problème de dos, n'en seront pas. Face à Ana Bondar (116e mondiale mais 50e en juillet 2022) et Dama Galfi (154e), nos chances reposeront principalement sur Greet Minnen (59e mondiale) et Yanina Wickmayer (71e) qui, chacune dans leur genre, sont un peu des "revenantes".
Leur mérite est grand d'avoir retrouvé le Top 100. "Venez les encourager, elles le valent bien, insiste Philippe Dehaes qui accompagnera sa joueuse, en appui du capitaine Wim Fissette, durant la semaine de préparation.
 
"Les Belges favorites, même sans Elise"
 
Q. Philippe, est-ce que l'absence d'Elise Mertens hypothèque grandement les chances de l'équipe belge ?
 
R. Il est toujours dommageable de ne pas pouvoir aligner ses meilleurs éléments. Et il n'est évidemment pas incohérent de dire que l'on aurait plus de chances avec elle dans l'équipe, même si je me souviens que son dernier match à Charleroi avait été plutôt compliqué. Maintenant si la question est : a-t-on a encore les compétences pour battre les Hongroises sans Elise ? La réponse est oui à 100 %, je n'ai aucun doute. A mes yeux, Greet et Yanina sont incontournables en simple comme en double, et, intrinsèquement, elles sont au moins aussi fortes que leurs adversaires. Qui plus est, en double, elles ont disputé 19 matches ensemble cette saison et en ont gagné 17. Les Belges partent toujours favorites. Comme d'habitude, la grosse incertitude réside dans la pression additionnelle due au fait de jouer chez soi, pour son pays, devant la famille, les amis, entre la peur de mal faire et l'envie de trop bien faire.
 
"La petite flamme s'est rallumée"
 
Q. En parlant de pression, votre joueuse, Greet Minnen, est pour la première fois la numéro une belge en Billie Jean King Cup...
 
R. ... C'est un poids à ne pas sous-estimer et sur lequel je travaille déjà depuis plusieurs jours, il ne faut pas que cela devienne un sac de pierre qui l'empêche d'avancer. J'ai suivi une formation en sophrologie qui m'aide énormément. Elle a accompli beaucoup de progrès au niveau mental, tout en émergeant d'une période difficile et douloureuse marquée par une double rupture, sentimentale et sportive. Elle s'est retrouvée toute seule, et c'est là qu'elle m'a appelé il y a tout juste un an. La collaboration avec Elise Mertens venait de s'arrêter, c'était lourd pour moi aussi, j'en avais marre, je n'avais plus envie, après 25 ans sur le circuit j'avais fait le tour. J'ai proposé de lui donner un coup de main sur la période de préparation foncière pour lui donner le temps de trouver un nouvel entraîneur. Et pendant les séances, la petite flamme s'est rallumée, j'ai découvert chez elle un potentiel que je ne voyais pas de l'extérieur. A la mi-décembre, elle n'avait toujours pas d'entraîneur. Comme je ne pouvais l'accompagner en Australie, je lui ai trouvé une solution avec un jeune, le Namurois Théo Vandeweghe, qu'elle ne connaissait pas et qui ne l'avait jamais vue. Il l'a rejointe sur place et cela s'est bien passé, ce qui a ouvert la voie pour la suite à un super compromis m'évitant d'être tout le temps sur la route, je la suis une quinzaine de semaines par an, Théo huit ou dix.
 
"Plus haut que je le pensais"
 
Q. Greet n'a jamais battu la numéro une adverse Ana Bondar, mais leur dernière confrontation sur dur date de 2015, et cette année la Hongroise n'a gagné que quatre matches en neuf tournois sur cette surface.
 
R. Ana Bondar est un peu plus à l'aise sur terre battue, c'est vrai, mais en même temps aujourd'hui toutes les joueuses sont bonnes sur toutes les surfaces. Elle est solide et joue très bien, mais n'arrive pas à Charleroi tout-à-fait en confiance, pas à son meilleur classement, toujours à la lutte pour entrer tableau final en Australie, pas super fraîche physiquement ou mentalement. Greet était 220e mondiale en début d'année, elle est 60e, deuxième Belge à la WTA, c'est fabuleux, c'est même monté plus haut que je le pensais en si peu de temps... mais 90 % des gens que je croise ne savent pas qui c'est quand je leur dis que je suis son coach. Il est vrai que c'est plutôt une grande taiseuse, assez introvertie, mais humainement c'est une super fille dont l'environnement privé et professionnel a complètement changé et qui est plus heureuse, plus ouverte. Cela se reflète dans son tennis que l'on a essayé de faire également évoluer et de rendre plus varié tout en restant offensif. Pour en revenir à la rencontre, elle connaît aussi bien Ana Bondar que l'inverse puisqu'elles ont été partenaires régulières en double sur les grands tournois, il n'y aura de surprise ni d'un côté ni de l'autre.
 
"L'histoire de Yanina est inspirante"
 
Q. Quel serait le message que vous adresseriez au public du tennis avant cette rencontre cruciale pour l'équipe belge ?
 
R. Celui de mieux considérer le tennis féminin, de ne pas comparer avec les hommes, de le regarder d'un autre oeil parce qu'il est différent mais pas moins intéressant, de prendre la peine de venir les voir, parce que ces filles le méritent et que c'est la seule occasion d'assister à une compétition WTA en Belgique. On raille leur côté émotif, mais au moins il se passe des choses, rien n'est figé, on s'amuse et le jeu est de bonne qualité. L'histoire de Yanina (Wickmayer) est inspirante, c'est un exemple sur le plan sportif. Elle est repartie de nulle part, elle était 322e début janvier, en tant que maman il n'est pas facile de quitter la maison en y laissant sa fille, ce sont de vrais sacrifices. Il faut voir avec quelle énergie et quel sérieux elle a abordé tous ces petits matches et tournois anonymes par lesquels elle a dû passer pour en revenir là. Qu'elle gagne ou perde, elle donne tout, surtout quand elle joue pour son pays, c'est l'occasion de lui rendre la pareille.
 
 

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