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Steve Darcis donne rendez-vous en 2019

Steve Darcis s'y connaît en contretemps physiques, ils ont martyrisé une carrière exemplaire. Le dernier en date, une fissure d'un tendon au niveau du coude qu'il traîne depuis juin dernier et qui le prive de compétition depuis la finale de la Coupe Davis à Lille jouée avec les moyens du bord, sera celui qui l'aura obligé à ronger son frein le plus longtemps. Le jour de l'Ascension, dans les accueillantes installations du Bercuit, le Liégeois a en effet annoncé qu'on ne le reverrait pas sur le circuit avant début 2019, soit à peine deux mois et demi avant son 35e anniversaire. Roger Federer ne gagne-t-il pas encore des Grands Chelems à 36 ans.

A 34 ans, il n'est sûrement pas usé physiquement par la compétition comme son âge pourrait le donner à penser. Le parcours de Steve Darcis a été tellement bouleversé par les blessures qu'il n'a pu jouer que la moitié du temps au niveau qui doit être le sien, c'est-à-dire Top 100 minimum. A une époque où les trentenaires jouissent d'une deuxième jeunesse sur le court, on comprend que le Liégeois, encore une fois confronté à l'adversité, n'ait pas envie d'abdiquer et ait l'ambition de clôturer si possible avec panache une carrière à montrer en exemple, il s'en sent capable. La fondation Hope and Spirit, orchestrée par Daniel Meyers et dont Steve est l'ambassadeur numéro un, organisait jeudi une agréable réception dans les installations du TC du Bercuit à Grez-Doiceau. Hope and Spirit, dont l'objectif de base est d'aider des moins de 20 ans à s'épanouir dans leur projet tennistique et dans leurs études (18 boursiers en 2018), soutient parallèlement un certain nombre de pros, belges et étrangers, invités aussi à partager leur expérience avec les jeunes. En ce jour d'Ascension, l'idée de base était de donner à Steve l'occasion d'annoncer son prochain retour sur les courts, en principe à Roland Garros, tout en offrant devant les journalistes un coup de projecteur à la fondation. Malheureusement, l'évolution de sa blessure au coude n'a pas suivi la courbe espérée, et le Liégeois a dû se rendre à l'évidence. Il a même finalement annoncé qu'il ne rejouerait pas en compétition cette année. En revanche, pas question d'arrêter la carrière, il donne rendez-vous en 2019. On y sera. Entretien.

"Une saison terminée qui n'a jamais commencé"

Q. Steve, que s'est-il passé ces dernières semaines pour que vous en arriviez à prendre une telle décision ?

R. L'objectif était en effet de recommencer à Roland Garros. Physiquement, j'ai travaillé comme un fou, j'étais prêt. Et lorsque j'ai repris la raquette cela s'est bien passé, du moins les premiers jours. Mais ensuite j'ai de nouveau ressenti des douleurs dans le bras. Elles ne m'empêchaient pas de jouer, mais le tendon s'est de nouveau un peu enflammé, je sentais que si j'insistais je risquais fort de me retrouver au point de départ. Je suis retourné chez le Dr Joris, je suis allé à Bruges chez un spécialiste, le Dr Soenen, qui m'a traité par ondes de choc. Compte tenu des précédentes opérations à l'épaule et au poignet, il faut apparemment plus de temps pour guérir le coude, on m'a conseillé d'attendre un petit peu, de viser plutôt fin août, début septembre. Mais avec encore à peine deux mois de compétition difficile de se motiver, le jeu en valait-il la chandelle ? Je me suis mis à table avec ceux qui comptent autour de moi, ce n'est pas facile à accepter mais il est apparu que la meilleure solution était de mettre fin à une saison... qui n'a jamais commencé, et de se fixer comme objectif une année 2019 délivrée de tout problème.

"Je ne veux pas finir avec des regrets"

Q. Qu'est-ce qui en définitive a fait pencher la balance ?

R. D'abord, le fait qu'en laissant au coude tout le temps de récupérer, et au bras de se reposer, je me donne les meilleures chances de repartir à fond l'an prochain, sans rien forcer, après avoir pris le temps de me préparer, notamment lors du stage Hope and Spirit à Abu Dhabi. Je n'ai en tout cas pas envie de terminer avec des regrets, sans avoir tout tenté. J'ajoute qu'avec une absence des courts de plus d'un an, j'aurai le droit d'utiliser mon classement protégé (90e mondial, il est retombé 160e pour l'instant, ndlr) durant douze tournois au lieu de neuf, Grands Chelems compris, ce qui devrait me permettre, si le coude va bien, de réaliser une bonne saison au cours de laquelle je n'aurai rien à défendre. Quand je vois le tennis moderne, tout le monde qui joue à plat, les jeunes qui n'ont jamais vu un slice, je crois que mon jeu peut encore en ennuyer certains, je n'ai pas le sentiment de ne plus avoir ma place sur le circuit. Après mes différents breaks, j'ai toujours eu l'impression de revenir plus fort, il y a juste un an j'atteignais mon meilleur classement (ATP 38), je ne vois pas pourquoi je ne pourrais pas encore réaliser de belles choses, en tout cas j'aurai fait le maximum.

"S'il avait fallu une opération, c'était terminé"

Q. Sérieusement, vous n'avez jamais pensé que, là, c'était la fin ?

R. Non. Ne pas terminer en beauté, quitter comme ça, me ferait mal. Honnêtement, ce n'est pas tant le circuit qui me manque que la compétition, et je sens que je peux encore, l'envie est toujours bien là. Il n'y a qu'un cas où j'aurais jeté l'éponge définitivement c'est si on m'avait dit qu'il fallait une opération, une de plus, cela aurait été clairement non. Michaël Llodra y est passé, cela lui a pris un an et demi, et il s'est arrêté là-dessus. Bien sûr, il va falloir que je trouve des choses à faire durant cette année, je vais m'entretenir mais pas continuer à bosser physiquement comme un malade sans but. Je m'y remettrai trois ou quatre mois avant la reprise, en attendant je vais peut-être me lancer dans le commentaire télé (dès ce week-end au tournoi de Madrid, ndlr) ou m'essayer au coaching, relayer Daniel (Meyers) durant quelques semaines avec Mirza Basic qui est 85e mondial et fait partie comme moi de la fondation. Ne vous y trompez pas, dans la tête je me sens plus que jamais joueur de tennis à 110 %, mais c'est aussi une manière d'envisager l'avenir et le moins que je puisse faire, quand je vois tous ces gens, et ces sponsors, qui continuent de me soutenir, tous ces mails d'encouragement, je ne peux que dire merci.

Q. A ce propos, vous avez reçu des messages en provenance du circuit ?

R. Entre zéro et un, plus proche de zéro... "mais il n'y a rien d'étonnant vous savez", intervient Daniel Meyers, "le tennis c'est d'abord un sport individuel, chacun pour soi."

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