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David Goffin est revenu de tout dans un thriller à couper le souffle

On espère que ceux qui aiment colporter l'idée que David Goffin manque de caractère ont regardé son troisième tour à Wimbledon contre le 13e mondial Daniil Medvedev (1 m 98, gros service, grosses frappes, difficile à déborder) au cours duquel le Liégeois est revenu deux fois à la hauteur de son adversaire, avant de faire de même au cinquième set alors qu'il était mené 1-4. Il a fini par l'emporter après 3,5 heures de jeu, dans une tension à couper le souffle et sur un dernier jeu à rebondissements à l'image d'un match de folie. David n'a pas très bien servi (moins de 50 % de premières balles dans les trois derniers sets), mais il n'a jamais lâché et en a été méritoirement récompensé.

Les occasions manquées

On savait notre numéro un revenu à un niveau digne de ce qu'il est capable de réaliser sur un court. On savait peut-être moins - même si Goffin avait prévenu - que le Russe Medvedev, son adversaire du troisième tour sur le gazon londonien, ne lui cédait en rien aux portes du Top 10. Cela nous a valu un mano à mano débridé et un peu irrégulier mais qui a tenu tout le monde en haleine durant cinq sets où l'un et l'autre sont passés par toutes les sensations et les couleurs de l'arc-en-ciel. Lorsque David s'est retrouvé engagé dans une course poursuite, mené un set à zéro puis deux sets à un (4-6, 6-2, 3-6), on a vraiment craint que ce soit le match des occasions manquées dans la mesure où il s'était retrouvé avec un break d'avance dans les deux sets qu'il a fini par perdre, baisse d'intensité et jeux de service défaillants relançant un adversaire accrocheur qui n'en demandait pas tant. 

Au mental

Pour autant, Goffin n'a jamais baissé les bras, avec des moments où il retrouvait coups et variations de son meilleur tennis, toujours dans la bonne attitude même quand cela ne tournait pas dans le bon sens. Après avoir de nouveau égalisé, à deux manches partout (6-3), c'est d'ailleurs au mental qu'il est allé chercher la qualification (7-5), poussant Medvedev au désespoir, le Russe faisant payer sa frustration à l'arbitre auquel il refusa de serrer la main à la sortie du terrain. Le juge de chaise, qui n'avait rien à se reprocher, n'avait fait que son devoir en rectifiant en sa défaveur, mais à juste titre, une décision erronée d'un juge de ligne, et en lui adressant un avertissement logique pour avoir frappé sa raquette dans la bâche de fond de court. 

Come back kid

Il faut dire que lorsque le Russe a pris l'avantage à 1-4 dans un cinquième set où la tension est montée en intensité au fil des minutes, il a dû penser avoir fait le plus difficile. Mais Goffin a donc refusé d'abdiquer, il a continué d'y croire, méritant pleinement sur ce match l'appellation de "come back kid" auprès des commentateurs anglais. C'est sur une double faute de Medvedev, qui a sans doute laissé un peu de sa lucidité dans sa discussion avec l'arbitre, que David a remonté son break et est revenu à nouveau dans le match... avant de glisser en fond de court et de faire peur à tout le monde en se tenant la cheville. Plus de peur que de mal, heureusement. Par la suite, on est resté jusqu'au bout sur le fil du rasoir, avec des balles de break de part et d'autre susceptibles de faire basculer la partie, ce que réussit notre compatriote à 5-5, avant de servir pour le match. 

"Le meilleur tennis sur gazon de ma carrière"

On était pourtant loin d'avoir tout vu. Lorsque Medvedev, dans l'effervescence générale, obtint une balle de 6-6, par deux fois la frappe de notre compatriote heurta la bande du filet et retomba du bon côté, on vit aussi David réussir un étonnant passing/réflexe victorieux sur un smash du Russe qui aurait dû être gagnant, avant qu'un ultime revers ne lui offre cette qualification espérée pour les 1/8es de finale. En attendant mieux lundi - on ne joue traditionnellement pas à Wimbledon le dimanche de milieu de tournoi - face à Verdasco ? Il ne faut surtout jamais vendre la peau d'un vieux guerrier espagnol bourré d'expérience avant de l'avoir vaincu, mais on a aussi rarement vu David Goffin s'extérioriser comme lors de cette fin de match, cela faisait plaisir à voir. "Je joue sans doute le meilleur tennis sur gazon de ma carrière", souriait-il, "avec tactiquement de petits plus dans certains domaines, service, amorties, slice, volée, ce qui m'a permis de tenir Medvedev, si je l'avais laissé entrer dans son jeu de grosses frappes c'était perdu d'avance."

"Dix victoires sur mes onze derniers matches en cinq sets"

"Je ne me souviens pas d’avoir disputé un match aussi épique", avouait encore notre compatriote, "durant toute la rencontre j'ai eu l'impression d'être le meilleur joueur mais avec son énorme service (20 aces, ndlr) il m’a poussé au bout de l’effort. Me retrouver à 1-4 au cinquième set sur deux ou trois petits coups qu’il ne tente jamais d'habitude c’était frustrant, mais je me suis accroché, j'ai toujours voulu croire que je pouvais encore faire tourner le match, j'avais l'énergie qu'il fallait, c'était la clé. J’aime les cinquièmes sets, cela se joue à un autre niveau, avec la fatigue, le stress, généralement je vois mieux ce que l’autre veut faire. J'ai remporté dix de mes onze derniers matches en cinq sets, c’est une très bonne "stat" (sourire), cela a été dur de conclure, mais je suis très fier de cette victoire." 

"Quand on gagne les bobos font moins mal"


Pour son troisième huitième de finale londonien, qui peut ouvrir sur un quart face à Novak Djokovic, David retrouvera donc une vieille connaissance, Fernando Verdasco, 37e mondial, qui se refait une verte jeunesse à 35 ans, sortant Kyle Edmund en cinq sets et le vainqueur de Tsitsipas, Thomas Fabbiano, en trois. Les deux rivaux en sont à 3-3 au bilan des confrontations directes, les dernières en 2017, mais deux victoires de Verdasco datent de 2013. "Les deux jours de repos vont me faire le plus grand bien", dit Goffin qui est resté aussi longtemps sur le court jeudi que lors de ses deux premiers matches pris ensemble. "La cheville ça va, quand la victoire est au bout les bobos font moins mal. Verdasco est un gaucher qui peut très bien jouer sur herbe et qui aime ça. Je me souviens qu’il menait deux sets à zéro en quart contre Murray avant de se faire sortir (en 2013 là aussi, ndlr). Un huitième de finale ce n'est pas rien, on ne s'est jamais affrontés sur gazon et je sais que contre lui cela peut être compliqué, mais je pense avoir montré que j’étais prêt à tout donner dans ce tournoi, on verra jusqu’où cela me mènera."
 

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