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Ysaline Bonaventure : "On n'était pas du tout préparé à ça"

Comment nos joueurs pros vivent-ils le confinement à la suite de l'épidémie de coronavirus ? A l'image de tous, ils prennent leur mal en patience. Sportive de haut niveau, Ysaline Bonaventure a encore le droit de s'entraîner normalement, mais elle voit parallèlement se tarir toute perspective de rentrées financières.

Avec Joachim Gérard et David Goffin (bloqué pour l'instant à Monaco), Ysaline Bonaventure, la joueuse numéro une francophone, est la seule élite à encore avoir la permission de poursuivre son entraînement tennis, à condition que cela se passe à huis clos au Centre fédéral de Mons dans des conditions clairement réglementées. Idéalement, c'est un bel avantage. Encore faut-il savoir à quoi se préparer et les moyens dont on dispose, alors que l'incertitude règne plus que jamais en maître sur le circuit professionnel à l'arrêt. Une première date possible de reprise avait été fixée par les instances internationales au 7 juin, elle vient d'être repoussée au 13 juillet, et Dieu sait quand, en réalité, les premiers matches pourront être disputés. Alors, mis à part le nécessaire entretien physique, l'essentiel maintien en forme, s'entraîner pourquoi et pour quand ? L'automne 2020, le début 2021 ? Qui plus est, à la 122e place mondiale qu'elle occupe aujourd'hui dans un ranking WTA désormais "gelé", Ysaline figure parmi l'imposant peloton des joueuses et joueurs qui ont du mal à nouer les deux bouts s'ils veulent entretenir un niveau pro. Or, durant six mois au moins, voire plus en fonction de l'évolution de l'épidémie dans le monde, elle va devoir vivre sans les rentrées financières qui lui permettent de boucler son budget, notamment les (qualifications de) Grands Chelems et les interclubs dans les pays proches, France, Allemagne, Hollande...

Compliqué

Malgré son statut privilégié de sportive de haut niveau, la Stavelotaine, 25 ans, qui habite désormais Sprimont (à 150 km de Mons) avec son compagnon, doit donc faire contre mauvaise fortune bon coeur comme tant d'autres en ce moment. La situation actuelle lui fait perdre pas mal d'argent. D'autant qu'elle caressait l'espoir d'entrer prochainement en tableau final de Grand Chelem grâce à un classement approchant le Top 100, son objectif de toujours. "Voilà seulement une ou deux saisons que je finis l'année en positif", rappelle-t-elle. "On n'était pas du tout préparé à ça, pas plus moi qu'un(e) autre. Donc, je ne suis pas ici pour me plaindre, beaucoup en ont bien plus le droit que moi. Je me suis constituée en société, je vais pouvoir toucher le chômage, je ne voyage plus, donc j'ai moins de frais, mais il faut de quoi vivre tous les jours aussi, il y a le crédit de la maison, l'essence... Aller à Mons, avoir toutes ces  installations pour moi seule, ne me dérange évidemment pas (sourire), surtout qu'il n'y a plus personne sur l'autoroute ça change, et pouvoir garder le contact avec la balle c'est bien même si on est en plein brouillard, sans savoir où on va. En principe, je peux avoir un sparring, un kiné, un préparateur physique, un entraîneur, et en même temps je n'ai plus les moyens de financer un staff comme sur la route, c'est la quadrature du cercle. Ainsi, je ne travaille plus désormais avec Patrick Meur pour la préparation physique, mais je peux heureusement compter sur les programmes concoctés par Alexandre Blairvacq pour le team pro AFT. Aujourd'hui, c'est compliqué pour tout le monde."

Pétition

Des pétitions, notamment celle de la Georgienne Sofia Shapatava, 371e mondiale, ont commencé à circuler sur le circuit demandant aux hautes instances (ITF/ATP/WTA) de soutenir financièrement les joueuses/joueurs qui manquent de moyens pendant l'arrêt des compétitions, comme cela se passe dans d'autres secteurs, certain(e)s s'étant d'ailleurs mis(es) à la recherche d'un autre emploi là où c'est encore possible durant la fermeture du circuit. "Les joueurs de tennis de rang inférieur n'ont pas d'économies", estime Shapatava, "nous n'avons aucune sécurité, personne ne prend soin de nous, personne ne bloque les factures, j'en connais qui ne peuvent subvenir à leurs besoins plus de deux ou trois semaines, ou qui vont arrêter de jouer car, après avoir dépensé les derniers centimes pour survivre, ils ne seront plus en mesure de repartir et de voyager. Je suis consciente que le monde du tennis n'est pas la priorité en ce moment, et c'est donc seulement à lui que je m'adresse, la fédération internationale m'a répondu qu'elle était très occupée et qu'elle reviendrait vers moi, depuis plus de nouvelles." "J'ai vu passer cette pétition, et bien sûr je la comprends, même si personnellement je n'en suis pas  là", répond Ysaline, "mais qui va le faire, et comment ? Malheureusement, je ne crois pas que cela puisse déboucher sur quelque chose, je n'en attends rien."
 

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