Responsive menu

L'équipe belge réalise son rêve impossible avec un Steve Darcis titanesque : elle accueillera l'Italie en quart de finale

Personne, mais alors personne, n'aurait cru un tel résultat possible : la Belgique s'est qualifiée pour les quarts de finale de la Coupe Davis en éliminant l'Allemagne chez elle grâce à un double magnifique et à un Darcis monumental, surtout au moment d'apporter le point décisif face au 22e mondial Alexander Zverev. Elle accueillera l'Italie - en terre francophone - du 7 au 9 avril.



 

Quand le capitaine Johan Van Herck a clamé en début de semaine que la Belgique avait une meilleure équipe que l'Allemagne, il a immédiatement précisé qu'il parlait en termes de "team spirit". Après la défection de David Goffin, notre groupe, certes soudé comme jamais, ne faisait en principe pas le poids sportivement face aux deux frères Zverev et à Philipp Kohlschreiber, tous classés plus de vingt places au dessus de notre meilleur joueur, Steve Darcis, qui plus est sur le sol germanique, dans la Fraport Arena de Francfort, avec un contingent d'à peine 50 ou 60 supporters belges, les fidèles d'entre les fidèles. On avait alors pensé que Johan cherchait surtout à gonfler le moral des troupes auquel le forfait de David in extremis n'avait pas fait grand bien, et, même si on sait la conviction qu'il met à la tâche, on peut se demander si lui-même avait envisagé, ne fut-ce qu'une seconde, le scénario vécu ce week-end. Pour tout dire, on est sûr que non.

"On s'entend tellement bien sur le terrain et en dehors"

Le fait est pourtant qu'il avait raison Van Herck. Raison au delà de tout entendement. Dans un sport qui, même en Coupe Davis, reste malgré tout une affaire de performance individuelle, c'est bien le collectif belge qui a parlé durant trois jours, dans la mesure où il a poussé nos joueurs de réaliser des performances dont ils n'auraient peut-être pas été capables en d'autres circonstances, et c'est justement ce supplément d'âme qui, à l'inverse, a semblé manquer à l'équipe adverse dans un combat où ce qui se passe dans la tête pèse énormément. Dans les moments clés, c'est toujours plus facile quand on se sent soutenu. "On s'entend tellement bien, sur le terrain et en dehors", résumait Steve Darcis, auquel on va bientôt ériger une statue sous le maillot national, "alors qu'eux, ça se voyait, ne forment pas une vraie équipe." Le premier jour contre Kohlschreiber, le Liégeois n'avait pas, de son propre aveu, livré une partie exceptionnelle, mais il n'avait rien lâché et s'était vraiment imposé au mental. Premier exploit. Le lendemain, Ruben Bemelmans et Joris De Loore ont joué remarquablement, comme un vrai double, face à des frères Zverev n'évoluant paradoxalement pas comme une paire véritable. Deuxième exploit. Jusque là, on pouvait dire que les Belges avaient remporté les matches dans lesquels on pouvait leur donner au départ une petite chance de gagner. Le troisième exploit à réaliser était aussi le plus improbable. Battre Alexander Zverev, 19 ans, 22e mondial, surdoué qui avait poussé aux cinq sets le Nadal de Melbourne et qui est le seul à avoir défait Federer cette année... il fallait un sacré sens de l'optimisme pour y croire, surtout après une première manche (2-6) où l'Allemand balaya tout sur son passage, Steve Darcis y compris.

"Je lui ai dit que, là, il n'était pas Mister Davis Cup"

Il faut dire que le filiforme Germain, dont le service (régulièrement au dessus des 215 km/h) est une arme fatale, passait alors 80 % de premières balles, ce qui ne laissait guère d'espace à notre compatriote pour s'exprimer. Le jeune prodige, revenant de Melbourne et qui en était à son troisième match du week-end, n'a heureusement pas maintenu la même cadence dans son engagement lors des deux manches suivantes. 44 % de "premières" au lieu de 80, ça change évidemment le paysage surtout que Darcis se sentait "plus fort du fond." "C'était très difficile au premier set et au début du deuxième", convenait-il, "je n'avais pas moins d'occasions de breaker que lui, mais il servait tellement bien, la différence se faisait sur le service et le retour, c'était un match très difficile, mais "impossible is nothing" (rien n'est impossible) comme l'a répété Johan." "Je trouve que Steve n'a pas bien commencé le match, et dans ces moments-là il faut essayer de toucher une corde sensible chez lui", explique le capitaine, "je lui ai dit que ce n'était pas pour ça qu'on était venu ici, que là il n'était pas "Mister Davis Cup" et qu'ensemble on allait faire en sorte qu'il retrouve la bonne attitude, ça a fonctionné, j'ai senti qu'il touchait mentalement Zverev qui n'était pas super physiquement on l'a senti." Dans les deuxième et troisième sets, remportés 6-4, il a chaque fois remonté un break, ce qui a forcément marqué son jeune adversaire, lequel a néanmoins retrouvé sa première balle dans une quatrième manche tendue à couper au couteau, avec un public allemand cette fois réveillé comme lors du final contre Kohlschreiber deux jours plus tôt. 76 % de premiers services retrouvés pour Zverev, aucune balle de break ni d'un côté, ni de l'autre, jusqu'au tie-break, le troisième du week-end pour Darcis, tous gagnés...

"Je savais que sa balle était bonne"

Dans cet ultime jeu décisif, on a de nouveau vécu des instants fous, magiques, qui nous manqueront lorsque les puissances d'argent auront eu raison de la Coupe Davis - ndlr : il fallait voir les gens s'agglutiner autour du stand de l'AFT au salon des sports bruxellois et vibrer à l'unisson devant le petit écran ! "Vous vous rendez compte qu'à part une double faute (bienvenue), Zverev n'a servi que des premières balles dans ce tie-break, je crois bien avoir cette fois sorti un match énorme", sourit Steve qui s'est octroyé quatre balles de match (pour une de 5e set à l'Allemand) au cours d'une nouvelle passe d'armes d'autant plus inoubliable que notre compatriote a cru avoir une première fois gagné le match sur une balle de l'Allemand donnée finalement bonne par le hawkeye pour deux millimètres. C'est du moins ce que l'on a cru sur le moment, parce que Steve reconnaissait après coup en souriant : "Je suis tombé sur le dos, et j'ai "challenger", parce que je voulais tellement qu'elle soit mauvaise... mais je sentais bien, je savais qu'elle était bonne." "Depuis que l'on est arrivé, on sait que les Allemands présentent un ensemble d'individualités, qui jouent seulement pour eux et nous ont sans doute pris un peu de haut, c'est peut-être là leur erreur", continue le héros du week-end, auteur d'un match réellement "titanesque". Avec Nadal à Wimbledon, Berdych aux Jeux Olympiques et la qualification pour la finale à Forest, où situe-t-il cette nouvelle "perf" ? "Difficile à dire. Sûrement dans le Top 3", sourit-il, sans trop s'engager. La victoire contre Delbonis face à l'Argentine après un invraisemblable marathon de trois jours avait certes débouché sur un évènement historique, mais ici l'adversaire était d'un tout autre calibre, et la victoire finale belge hautement improbable.

En quart de finale, chez nous, début avril
 
Alors que l'on pensait que les Allemands, une des rares nations à s'aligner au premier tour avec ses meilleures forces, pouvaient afficher de grandes ambitions dans cette compétition, c'est donc la Belgique qui sera en quart de finale début avril (du 7 au 9) - ce sera en Belgique francophone contre l'Italie de Fognini, Seppi et Lorenzi qui a éliminé l'Argentine, tenante du titre, à Buenos Aires. Les joueurs qui étaient à Francfort avaient-ils quelque chose à prouver par rapport au forfait de Goffin, a-t-on demandé à Steve ? "On n'a rien à prouver, on a déjà réalisé des résultats avec David et sans David. Ce que l'on espère avoir montré c'est que l'on a encore quelque chose à réaliser dans cette compétition, surtout que l'on peut jouer le prochain match chez nous, et cette fois avec David je l'espère. Je ressens bien sûr une fierté personnelle après ce j'ai réussi ce week-end, mais c'est vraiment un travail d'équipe, on la mérite tous cette victoire !" "Pas de souci, on joue pour notre pays, et bien sûr la porte est grande ouverte à tous, je pense que l'on a confirmé, y compris à David, que l'on pouvait faire mal à tout le monde", sourit Johan Van Herck qui avoue avec souffert mille morts sur le banc, surtout durant cette ultime partie : "Je suis si fier de tous ces gars, c'est si émotionnel, je suis cassé de chez cassé, je vais le sentir encore durant quelques jours, c'est ma manière de coacher, mais qu'est-ce que ça valait le coup ! Je place cette victoire juste en dessous de celle contre l'Argentine, on ne jouait pas une place en finale, mais en revanche on a réalisé une prestation que personne n'attendait."
 
A Sofia ce mardi, mais pas contre Baghdatis
 
La réalité du circuit ATP veut que Steve Darcis, après avoir disputé neuf sets et joué sept heures en trois jours, est déjà au programme (18 h) du tournoi de Sofia ce mardi... où David Goffin est "bye" au premier tour. Steve n'affrontera pas Marcos Baghdatis comme c'était prévu, mais un qualifié... allemand Maximilian Marterer, 21 ans, 172e mondial.
 
Le tweet de David Goffin

 
David Goffin a salué la victoire belge d'un "Bravo les gars, super content pour vous ! Vous avez été incroyables." Cmon Belgium.
 
Les résultats

 
Kolhschreiber - Darcis 4-6, 6-2, 6-3, 6-7(2), 6-7(5) A. Zverev - De Greef 6-3, 6-3, 6-4 A. et M. Zverev - Bemelmans/De Loore 3-6, 6-7(4), 6-4, 6-4, 3-6 A. Zverev - Darcis 6-2, 4-6, 4-6, 6-7(8) Ruben Bemelmans a également battu Mischa Zverev 7-5, 6-1 lors d'un 5e match "pour du beurre"
 

Retour à la liste