Responsive menu

Belgique – Italie Jour J-13

2000 : la version de Filip Dewulf

La dernière rencontre de Coupe Davis entre la Belgique et l’Italie a eu lieu en 2000 à Venise. L’équipe belge dont le capitaine était Gabriel Gonzalez était composée des deux frères Rochus, de Tom Van Houdt et de Filip Dewulf. Elle s’était imposée par 4-1 mais ce match ne constitue pas un souvenir exceptionnel pour Filip Dewulf qui a accepté – ce dont nous le remercions ici – de nous livrer sa version des faits.

« Venise, septembre 2000
On s’était donné rendez-vous à Zaventem pour le départ vers Venise mais, au dernier moment, on apprend que Xavier Malisse ne viendra pas avec nous. Il était sélectionné mais il y avait un problème financier et, aussi, un souci de respect entre lui et la fédération. Il a donc décidé de ne pas venir. Jean-Louis Caverenne et André Stein sont alors venus me voir pour essayer de convaincre Tom Vanhoudt de remplacer Xavier au pied levé.
Tom était déjà mon meilleur ami mais il faut savoir qu’il n’avait pas été sélectionné pour la rencontre en Russie (c’était le début des frères Rochus) plus tôt dans l’année alors qu’il était à ce moment le meilleur joueur de double (top 50 !). 

J’ai alors pris mon téléphone et j’ai réussi à le convaincre : Il est venu nous rejoindre le jour-même. 

Nous logions à l’hôtel Bologna en face de la gare de Mestre, en dehors de Venise. Au départ, nous étions déçus de ne pas être à Venise mais, par la suite, on a plutôt apprécié le fait d’être en dehors de la cohue du centre-ville. Qui plus est, la nourriture était tout bonnement exceptionnelle.

Même mon épouse (qui ne l’était pas encore à l’époque) se rappelle toujours aujourd’hui du « spaghetti a l’astice’ (homard) qu’elle a dégusté dans le restaurant de l’hôtel. Délicieux !

Pendant la semaine, on avait en plus bien profité du charme de Venise. Le dîner officiel avait été organisé dans l’ancien et magnifique casino. Quant au tirage au sort, il a eu lieu dans le fameux Palais des Doges. J’ai adoré. 

Nous avons été très bien accueillis au petit club Green Park, ou j’avais déjà joué un challenger. J’étais plutôt en bonne forme même si j’étais toujours en plein comeback suite à une blessure qui m’avait fait arrêter pendant huit mois en 1998 et 1999. Je n’étais classé que 139eme mais…. mais battais tout le monde à l’entraînement.

C’est pour cette raison que Gabriel Gonzalez, qui était toujours mon coach à l’époque, m’avait choisi aux dépends de Christophe Rochus mieux classé que moi (ATP 88). 

Le vendredi, Olivier Rochus a fait l’étalage de tout son talent en infligeant un vraie gifle à Andrea Gaudenzi dans le premier match (6-2 7-5 6-3). 

Les Italiens (joueurs et public) étaient un peu sous choc. Ce dont j’ai profité pour prendre le premier set 6-1 contre Davide Sanguinetti. Je le connaissais bien et je savais que, normalement, je devais le battre sur terre. 
Lui le savait aussi et il a commencé à jouer l’homme. 

Il me regardait tout le temps, m’insultait. Il a également chauffé le public et il est arrivé à ses fins et à prendre l’ascendant moral sur moi. J’avoue que je ne comprenais pas pourquoi il agissait de cette manière car je le connaissais et je pensais que c’était un type bien, gentil avec qui, d’ailleurs, je m’entendais bien. 

J’ai complètement perdu les pédales et je me suis incliné en quatre manches, perdant même la dernière par… 6-0 !

Pour moi, c’était une énorme déception personnelle. D’avoir perdu, évidemment, mais surtout, j’étais triste de la manière dont le match s’était déroulé. Je n’étais vraiment pas bien dans ma peau et je peux dire que ce match face à Sanguinetti a laissé des traces.  

Le lendemain, Tom Vanhoudt (remplaçant !) et Christophe Rochus ont sorti un fameux double et ont battu  Nargiso/Gaudenzi en trois petits sets (6-4 6-4 6-4). 

Ils ont proposé une réelle démonstration en retours et une magnifique habilité au filet. 

Le dimanche, c’est Christophe Rochus qui est monté sur le terrain. Je pense que son frère Olivier était blessé. Il était opposé à Sanguinetti pendant que, moi, je me rongeais les ongles dans les vestiaires. 

Le match a duré, duré mais Christophe a fini par s’imposer sur le score de 7-5 au dernier set !

D’un côté, j’étais soulagé de ne pas devoir jouer le match décisif avec un public hyper chaud mais,  d’un autre côté, j’aurais bien aimé avoir l’occasion de jouer un match important, histoire de me reconstruire. 

Mais bon, le plus important était évidemment que la Belgique avait gagné ce duel. Je suis donc monté sur le terrain pour jouer un match « pour du beurre » contre Renzo Furlan. 

On avait convenu avant le match que celui qui gagnait le premier set, gagnerait aussi le deuxième. J’avais déjà bu quelques bières après la victoire de Chris et j’étais très content de ce scénario. 

Hélas !,  après sept jeux, j’ai commencé à sentir mon genou devenir instable. Jean-Louis est venu sur le terrain et j’ai tout de suite compris que c’était grave. J’ai tout de même gagné le premier set 7-5 (et logiquement comme convenu, le deuxième 6-2).

Mais, je ne savais pas encore que j’étais en fait en train de vivre le début de la fin de ma carrière. 

En rentrant je me suis fait opérer au ménisque et au cartilage. 

Trois mois après j’ai encore essayé de revenir mais mon corps avait besoin de trop de temps pour me permettre de revenir au top. 

En avril 2001, soit neuf mois après ce match Italie-Belgique, j’ai mis fin à ma carrière... »


Filip Dewulf

Et quelle carrière !
En Coupe Davis, Filip a été sélectionné 21 fois, il a joué de 1991 à 2001, remportant 12 simples sur 28, 4 doubles sur 10.
Il a été classé 39eme mondial, a remporté deux tournois (Vienne 95 et Kitzbuhel 97), a été en demi-finale à Roland Garros en 97 et en quart en 98.
Il est aujourd’hui l’un des meilleurs journalistes tennis de Belgique et a conservé l’humilité et la gentillesse qui en ont fait l’un des joueurs les plus attachants – et les plus intelligents – du circuit.

Demain : Bernard Mignot nous raconte ses souvenirs avec les joueurs italiens.
 

Retour à la liste